La route des étangs de la Sologne à vélo

C'était un mardi, le ciel était gris, il avait plu sans relâche toute la journée. Mon après-midi au bureau avait été dense et quelque peu stressante. C'est avec soulagement que j'accueillais le crissement de la dernière porte vitrée. Dehors la pluie avait transformé la ville en miroir triste. Il était 21h00 passé quand je retrouvais le calme de mon petit appartement. Exténuée par l'agitation urbaine, je décide d'aller prendre un grand bol d'air au calme à la campagne. J'appelle tante Agnès qui vit désormais au cœur de la Sologne.

Ma pause hors du temps en Sologne des étangs

Je quitte Paris avec Marie en début d'après-midi pour éviter les interminables ralentissements des fins de semaine. Après 2h00 d'autoroute qui nous paraissent sans fin, place au calme et à la nature. Nous devinons çà et là, cachés derrière des haies en fleurs, les étangs de Sologne. La beauté de la Sologne se révèle vraiment aux curieux. Nous arrivons dans le village de Saint-Viâtre. Les maisons de briques rougies par les rayons du soleil déclinant nous réveillent de la léthargie des voyages en voiture.

Après un petit-déjeuner copieux fait de tartines de pain frais et de confiture de fraises de Sologne, nous partons à vélo sur la route des étangs. Les chants des oiseaux des haies, les cris du geai des chênes et la pie bavarde accompagnent nos premiers coups de pédales et semblent nous encourager dans notre effort matinal.

Après 1 km, nous devinons les premiers étangs protégés par de larges roselières que le soleil levant transforme en gerbes d'or. Nous imaginons la vie du peuple des étangs dans ces hautes herbes protectrices. Pour vivre heureux, vivons cachés.

C'est avec énergie et entrain que nous parcourons la dizaine de kilomètres qui nous sépare de notre pause-déjeuner. Nous naviguons dans un océan de verdure. La fragrance citronnée des sapins de douglas mélangée à celle particulière de l'humus des forêts de Sologne stimule nos sens et tonifie nos corps. Marie reconnaît l'air iodé de la Gascogne de son enfance. La magie opère.

Nous reprenons la route, groguies, ivres de silence. Nous traversons les étangs sur un long tapis bleu bordé de vert, entre deux eaux. La Gravelle, Bièvre, Briou, Marcilly, Favelle, les étangs de Sologne s'enchainent sans que nous puissions les dénombrer. Au château de Favelle, les prairies reprennent leur droit et nous entrevoyons au loin le clocher tor de l'église de Saint-Viâtre. Des couples de canards jaillissent çà et là des fossés devant nos roues. Endroit qu'ils jugent certainement plus discret que l'étang pour mener à bien le renouvellement de l'espèce. Nous rions à chaudes larmes.

Nous retrouverons la petite maison de briques aux volets rouges où tante Agnès attend impatiemment notre retour. Nous sommes sommées de répondre à une multitude de questions, jeu auquel nous nous prêtons avec générosité, tellement notre expérience en Sologne est riche de sensations. Nos corps recroquevillés se sont ouverts. Nous avons scruté les haies et les bordures d'étang à la recherche d'oiseaux, traqué les odeurs, écouté le moindre bruit, caressé les écorces des arbres et les herbes des champs. Nous avons appris à vivre la Sologne.